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L’albanais n’est pas simplement un outil de communication, c’est un symbole de résistance.
Liburn Mehmetaj, co-président de LAPSH: " Notre mission est l'éducation des enfants albanais dans notre langue, notre histoire et notre culture, en harmonie avec la réalité éducative suisse "

L’Association des Enseignants et Parents Albanais (LAPSH), dans la forme qu’elle a aujourd’hui, a été fondée il y a 30 ans, en 1995, bien que les débuts de l’enseignement complémentaire de la langue albanaise en Suisse remontent à une période un peu plus ancienne. Sa création a permis d’institutionnaliser l’enseignement de la langue et de la culture albanaises également auprès des autorités suisses.
Depuis lors, la LAPSH a rempli une mission noble: transmettre et cultiver la langue maternelle auprès des générations qui grandissent dans une nouvelle réalité, loin du pays d’origine. Concernant les objectifs, les réussites, les défis et les difficultés de cette organisation à mission spécifique, s’exprime Liburn Mehmetaj, coprésident de la LAPSH ” Naim Frashëri “.
Albinfo.ch: Quand et comment la LAPSH a-t-elle été fondée en Suisse?
L. Mehmetaj: L’enseignement de la langue albanaise en Suisse a commencé à la fin des années 1980, et l’institution LAPSH a été créée en 1995, en réponse à la nécessité urgente de préserver la langue et l’identité nationale parmi les enfants albanais en diaspora. L’objectif était que ces enfants puissent retourner dans la patrie et poursuivre leur scolarité en langue albanaise. Elle a été fondée par des enseignants et des parents dévoués qui croyaient que la langue albanaise est le fondement de notre appartenance nationale, en coopération avec le gouvernement du Kosovo de l’époque.
Albinfo.ch: Quelle est la mission et la vision de votre organisation?
L. Mehmetaj: Notre mission est d’éduquer les enfants albanais dans leur langue, leur histoire et leur culture, en harmonie avec la réalité éducative suisse. Notre vision est une génération consciente de ses origines, fière de son identité et prête à bâtir des ponts entre deux cultures: celle dans laquelle elle vit et celle dont elle provient.
La langue albanaise est notre pont commun. Ce n’est pas un seul État ni une seule religion qui nous unit, mais une langue qui porte en elle l’histoire, la culture et l’âme albanaises. La LAPSH existe pour protéger cette langue, génération après génération.
Albinfo.ch: Quelles sont les principales activités que vous menez (par ex. cours complémentaires en langue albanaise, activités culturelles, séminaires pour parents et enseignants)?
L. Mehmetaj: La LAPSH Suisse est organisée comme une fédération d’associations cantonales. Dans chaque canton, les associations sont responsables de l’organisation concrète des cours complémentaires en langue albanaise, de l’obtention des salles de classe, de la coopération avec les communes et les écoles locales, ainsi que du financement des activités. Elles organisent également des événements culturels, tels que les célébrations de la Fête du Drapeau, de la Journée de l’Enseignant ou de la Journée de l’Alphabet.
Au niveau central, la LAPSH coordonne le travail entre les cantons, gère la communication institutionnelle, distribue les manuels envoyés par le Kosovo et l’Albanie, participe à des séminaires et formations et assure le soutien au développement professionnel des enseignants.
Albinfo.ch: Combien d’écoles et d’élèves albanais la LAPSH regroupe-t-elle dans toute la Suisse?
L. Mehmetaj: Actuellement, et selon la base de données élaborée en 2024, la LAPSH est présente dans 18 cantons de Suisse, avec 152 classes actives et plus de 1’800 élèves qui suivent l’enseignement.
Albinfo.ch: Comment organisez-vous et soutenez-vous le travail avec les enseignants et la collaboration avec les parents?
L. Mehmetaj: La LAPSH est reconnue par les autorités éducatives suisses depuis 1996 et dispose du droit d’organiser des cours complémentaires en langue albanaise au sein des écoles publiques de chaque canton. L’enseignement est assuré par des enseignants qualifiés, engagés par le biais des associations cantonales de la LAPSH, et suit un curriculum adapté aux enfants de la diaspora.
Les parents ne sont pas de simples participants, mais de véritables co-organisateurs. Même si les enseignants jouent le rôle principal, les parents participent activement à la vie des écoles albanaises, contribuent à l’organisation des activités et font souvent partie des comités directeurs des associations cantonales, en aidant à la gestion et à la prise de décision. Cette étroite collaboration entre enseignants et familles est l’une des forces essentielles qui maintient vivant et fonctionnel le réseau de la LAPSH dans toute la Suisse.
Cette coopération repose sur une philosophie simple mais puissante, représentée également dans notre symbole: le triangle symbolise le lien indissociable entre le parent, l’enseignant et l’élève. Chaque angle soutient et renforce l’autre. Sans le parent, il n’y a pas de continuité, sans l’enseignant, il n’y a pas de direction, et sans l’élève, il n’y a pas d’avenir.
Albinfo.ch: Quels sont les plus grands défis auxquels vous êtes confrontés dans votre mission éducative et culturelle?
L. Mehmetaj: Comme toute organisation reposant sur le travail bénévole, la LAPSH est confrontée à plusieurs défis permanents: assurer un financement durable, trouver et motiver des bénévoles ainsi qu’augmenter le nombre d’élèves. Malgré ces défis, notre force réside dans la conviction inébranlable que la langue et la culture sont des valeurs qui méritent chaque effort.
Albinfo.ch: Quelles sont les réalisations dont vous êtes le plus fier en tant que réseau scolaire et communautaire?
L. Mehmetaj: Nous sommes fiers d’avoir construit un réseau fonctionnel d’écoles à travers toute la Suisse et du processus d’unification entre la LAPSH et la SHSH (Écoles Albanaises en Suisse), qui est mis en œuvre avec succès dans presque tous les cantons. Nous avons créé une base de données et une carte des écoles albanaises, ce qui n’existait pas auparavant. De nouvelles classes continuent de s’ouvrir et nous avons mis en place un processus clair pour l’engagement de nouveaux enseignants.
Albinfo.ch: Collaborez-vous avec des institutions éducatives suisses ou avec d’autres organisations albanaises en Suisse et à l’étranger?
L. Mehmetaj: Oui. Nous collaborons avec des écoles et des communes locales dans de nombreux cantons, avec les ambassades albanaises et kosovares ainsi qu’avec les autorités compétentes des pays d’origine, mais aussi avec des organisations culturelles albanaises en Suisse et dans différentes diasporas.
Albinfo.ch: Comment voyez-vous l’avenir de la LAPSH et votre rôle dans la préservation de l’identité nationale auprès des jeunes générations?
L. Mehmetaj: L’avenir de la LAPSH réside dans la modernisation de l’enseignement, dans l’engagement des nouvelles générations et dans le renforcement de la coopération avec les institutions locales et celles des pays d’origine. Nous visons à assurer la continuité grâce à l’implication des parents et des nouveaux enseignants et à institutionnaliser davantage l’enseignement de l’albanais comme une composante durable du système éducatif en Suisse. L’identité se préserve lorsque la langue, la culture et l’école évoluent avec leur temps sans se couper de leurs racines.
Albinfo.ch: Quel message souhaitez-vous transmettre aux parents et aux enseignants albanais en Suisse?
L. Mehmetaj: Pour la langue albanaise, des vies ont été sacrifiées, des alphabets interdits ont été portés sur les épaules, des écoles ont été ouvertes dans la clandestinité et des générations entières ont pris des risques pour la garder vivante. Notre langue n’est pas seulement un outil de communication, c’est un symbole de résistance, d’identité et de dignité nationale. Aujourd’hui, il ne faut plus de sacrifices. Il faut de l’attention, du dévouement et de la volonté. Enseigner l’albanais à un enfant est sans doute le geste le plus simple et le plus puissant qu’un parent ou un enseignant albanais puisse accomplir.
La science aujourd’hui nous dit deux choses essentielles: la langue s’apprend uniquement à l’école (indépendamment des qualifications des parents ou de leur niveau de maîtrise à la maison) et les enfants qui maîtrisent leur langue maternelle apprennent ensuite encore mieux l’allemand, le français, l’anglais et toutes les autres langues.
C’est un devoir moral et un héritage spirituel. Car parler l’albanais signifie maintenir vivante l’histoire d’un peuple qui ne s’est jamais rendu. Et cela, en fin de compte, est le minimum que nous puissions faire.
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