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Le Kosovo brise un tabou: fondation du Conseil pour les femmes agressées sexuellement

La Présidente de la République du Kosovo, Atifete Jahjaga, a inauguré ce dimanche le Conseil national pour les victimes des agressions sexuelles pendant la guerre.

Près de 20 mille femmes ont été sexuellement abusées par les membres des forces serbes durant la dernière guerre au Kosovo. Jusqu’à aujourd’hui, pendant 15 ans, ce sujet est resté tabou. Pour ne pas «enterrer» cette problématique, la présidente Atifete Jahjaga a inauguré ce dimanche le Conseil national pour les victimes d’agressions sexuelles durant la guerre.

Ce conseil, créé par un décret spécial de la Présidente, vise à coordonner les activités des institutions et des organismes travaillant à la réhabilitation des victimes d’agressions sexuelles durant la guerre au Kosovo.

«Le poids des souffrances et les conséquences de la guerre continuent à peser sur nous toutes et tous. Il n’y a aucun doute que ces souffrances sont encore plus grandes pour ces hommes, ces femmes et ces familles qui ont été victimes d’actes de torture», a déclaré la Présidente Jahjaga.

Le Kosovo, a-t-elle continué, a ouvert le chapitre de la paix. Le pays a mis sur pied une société qui croit aux droits humains et qui les défend. Quinze ans après la guerre, les institutions du pays ouvrent la discussion sur une thématique très douloureuse issue de la guerre: les violences sexuelles.

«Les lourdes conséquences de cette guerre ont porté atteinte à la dignité des victimes et les moyens utilisés contre elles visaient à installer une peur permanente dans leurs vies ainsi qu’à ôter à notre société toutes ses valeurs humaines. Ces conséquences continuent encore aujourd’hui à peser sur les vies des victimes et de leurs familles», a continué la Présidente.

«Les victimes d’agressions sexuelles souffrent au niveau psychologique, social et économique. Elles ont besoin du soutien des institutions et de la société afin de faire face à une réalité lourde dans laquelle elles se retrouvent malgré elles».

Selon la Présidente, le Kosovo ne possède pas de statistiques concernant le nombre de cas d’agressions sexuelles ayant été commises pendant la guerre. Les estimations tournent autour des 20 mille victimes. «Savoir combien de personnes ont été agressées sexuellement n’est pas réellement important. S’il n’y avait eu qu’une seule victime, elle aurait mérité à elle seule tout autant notre attention».

Le statut juridique de ces victimes n’est pas encore établi, et il existe une certaine culture de l’impunité pour ce genre de crimes. La raison d’être de ce nouveau conseil sera donc également de prendre des mesures pour la prévention des agressions sexuelles.

Pour la Présidente, il n’y a aucun doute que pour prévenir ce type de crimes, une conscientisation au niveau institutionnel est au préalable nécessaire. Selon elle, cela ne sera possible que lorsque les coupables de ces crimes auront été traduits en justice pour leurs actes.

«Nous ne pouvons pas changer le passé, mais nous pouvons nous assurer que l’avenir des victimes ne soit pas déterminé par ce passé amer. Nous pouvons faire en sorte que l’avenir de ces familles, des enfants des victimes ne soit pas assombri par un crime commis injustement contre eux», a ajouté la Présidente.

Elle a demandé à ce que le voile du stigmate soit enfin levé. Elle souhaite «briser le silence qui a été la règle jusqu’ici, et déculpabiliser les victimes pour enfin blâmer les responsables de ces crimes».